Je me rends dans la station touristique la plus prisée du Vietnam (après la baie d'halong): j'ai nommé les paysages sublimes de Sapa, une ville nichée à plus de 1500m qui mélange des ethnies telles que les Hmong ou les Dao .


Mission 1 : trouver la bonne agence de trek
J'ai parcouru de nombreux sites internet à la recherche du trek idéal.
Mon seul critère était de croiser le moins de touristes possible sur les routes. Mais ce vœux est difficile à exhauster car la région est victime de son succès et donc d'un envahissement touristique qui a défiguré la ville et ses alentours.
SAPA est le théâtre d'un chantier dont les bruits des marteaux piqueurs résonnent de toute part.
Les immenses immeubles me font penser à une station de montagne industrielle ...bref la municipalité a préféré construire vite afin de répondre à la demande plutôt que de faire un effort esthétique et écologique.

A peine descendue du bus, je me fais accoster par une dizaine de femme H'mong qui me proposent avec un anglais approximatif de réserver un trek en leur compagnie. C'est fort aimable mais je vais me débrouiller seule! Et le harcèlement continu de plus belle. Même si je leur raconte que mon trek est réservé ( ce qui est faux ), cela ne les décourage point. Cerise sur le gâteau, il fait froid, humide et il pleut.

Mon auberge se situe à 20 min à pied depuis la gare routière, et les chemins sont boueux. Après 10min de montée interminable, je pose mon sac au Go Sapa hostel. Le soucis est que la température des chambres est à peu près similaire à celle de l'extérieur. Pas le temps de penser au froid qui m'attendra ce soir, je dois démarcher plusieurs agences qui ont une bonne réputation sur internet.

La première se nomme nomadtrails et organise des tours de deux jours + une nuit dans un groupe incluant max 6 personnes. J'avais entendu parler de cette proposition alléchante. Le touriste pense qu'il est seul avec six camarades, mais il se retrouve avec les autres randonneurs des agences de la ville. Résultat, 100 petits moutons se suivent en rang pour admirer le paysage ( l'angoisse ) !

Je décline poliment leur offre et me rends dans l'agence Sapa O Chau qui organise des trek en petit comité voire privé. Les prix sont élevés ( 110€ tout inclus pour 1 pers), et je ne suis pas convaincue par la prestation.

Je me rends enfin dans l'agence ( ou plutôt l'association) la plus éthique de la ville et dont j'avais tant entendu parler. Les commentaires concernant Ethos sont tous positifs et m'encourage à gravir les 20 min de montée pour rencontrer les fondateurs : un couple anglo- vietnamien qui possède déjà une longue expérience dans l'humanitaire. J' ai été accueillie comme une reine avec un thé local à base d'épices, de gingembre et de miel , et un fruit inconnu entre la poire et le melon. Phil ( l'anglais) m'a raconté les évolutions des ethnies du nord jusqu'à présent, sans oublier les effets néfastes du tourisme de masse. D'ailleurs , la plupart des agences qui proposent des treks ne connaissent pas la région et ses vallées. Leur nombre ne cesse d'accroître, poussant les ethnies à mendier à la sortie des bus. En effet, bon nombre d'entre eux ne parlent pas l'anglais et se voit refuser le poste de guide. Les tarifs proposés par Ethos sont onéreux : 120$ pour deux jours et une nuit tout inclus, mais qu'importe , je préfère que mon argent soit investi dans un programme éthique et durable plutôt que dans les poches d'une agence qui ne rémunère pas ses guides. Si vous souhaitez en savoir plus n'hésitez pas à consulter leur site internet : http://www.ethosspirit.com/


C'est parti pour la rando
Le lendemain à 8h30, je rencontre Ghenh ma jeune guide de 22 ans vêtue de son habit traditionnel. Le feeling est immédiat et on apprend à se connaître. Elle parle parfaitement l'anglais ce qui facilite les échanges. Elle m'explique qu'elle a appris seule la langue grâce aux touristes qui fréquentaient le restaurant de sa mère. Bref une soif d'apprendre sans limite. RESPECT car en 10 ans d'école, mon anglais était toujours au stade de débutant.
Ensuite Ghenh s'est mariée à 16 ans ( comme la plupart des filles de son ethnie) et a été maman dès l'année suivante.
Aujourd'hui , ses deux enfants sont âgés de 4 ans et 3 ans.

Nous nous rendons au marché afin de remplir le panier. Au menu : tofu frais, tomate, herbes, oignon, ail, haricots verts et poulet. Le repas s'annonce grandiose.

Notre trek débute à 10 min de Sapa. Nous nous enfonçons dans la montagne et le chemin qui nous y emmene offre une vue imprenable sur la vallée et ses champs de rizières mais aussi de plantation de légumes. La marche s'avère plus compliquée que prévue à cause de la boue qui est omni présente.

L'heure du déjeuner approche et on se rend chez une habitante qui nous accueille près du feu ( il fait froid ) ! Les maisons sont construites à partir de béton et de bois sans aucune isolation. Tout est ouvert et le feu est à même le sol sans conduit d'aération - bonjour la fumée dans les yeux. Je fais abstraction de ces détails car je suis plongée dans un univers 100℅ local , pendant que d'autres touristes se remplissent la panse dans le restaurant du coin. 1h de cuisine plus tard, nous dégustons du tofu à la tomate, du riz ( of course) ainsi que des haricots.

Nous repartons dans le froid, mais pas le temps de se plaindre, mes yeux en prennent plein la vue, à tel point que j'oublie de regarder le chemin et manque à plusieurs reprise de trébucher. Nous arrivons dans son village aux alentours de 16h. Je rencontre son mari, très occupé dans les travaux de sa maison, ainsi que ses petits bouts qui m'accueillent à bras ouverts. Apres avoir joué avec les petits, j'aide Ghenh à cuisiner...ce n'est pas facile de manier l'art culinaire des H'mong mais le résultat est plutôt satisfaisant : porc aux herbes , nems aux légumes, patates et riz. LE PARADIS. La soirée s'enchaîne autour du feu. Comme vous pouvez le voir dans l'album, la pièce principale comporte une cuisine et un feu. La chambre se situe dans la maison d'à côté et ne possède que deux lits. Vous comprendrez que le confort est plus que rudimentaire. Dans le village, chacun vit sans salle de bain, canapé , cuisine équipée et jouet. Le petit de Ghenh est âgé de 4 ans et se prénomme Metu ( prononcer mitou). Il est capable de couper du bois à l'aide d'une machette, allumer un feu, se rendre à l'école tout seul, monter dans les arbres et couper une carotte en petit morceau. J'ai bien cru qu'il se blesserait à plusieurs reprises et que sa mère allait le punir. Au contraire​, elle rigolait de la situation. J'assiste à deux extrêmes : l'éducation portée sur le modèle français et qui surprotège l'enfant, de l'autre, l'éducation rude des Hmong qui encourage l'enfant à se débrouiller par lui même. Nous nous couchons à 21h comme des bébés dans une température glaciale ! Heureusement qu'une énorme couverture combinée à une polaire + 2 tee shirt + collant + chaussette font l'affaire ( j'ai l'impression de partir au ski).

C'est REparti pour un deuxieme jour de marche
Le lendemain, réveil en douceur...enfin les courbatures dues au 6h de marche me font redecendre de mon nuage. Les céréales ou le pain beurré me manquent terriblement. Je me contente d'un bol de riz pour tenir jusqu'au déjeuner. C'est reparti pour une journée de pur bonheur à admirer la vue.

Contrairement au jour précédent, les paysages sont différents. La montagne et la forêt laissent place aux rizières qui s'étendent sur toute la vallée. La récolte du riz commence à partir du mois de juin, et pour l'instant, les paysant plantent des herbes afin de préparer le terrain à la plantation de riz.

Ghenh a pu m'emmener dans les endroits les plus préservés de Sapa, mêlant montagne et rizière. Elle a su me faire découvrir sa culture et partager des moments d'intimité avec sa famille. Je l'admire pour sa force et sa détermination. Elle a appris l'anglais par ses propres moyens, élever une famille tout en trekant ( elle portait son petit dans le dos jusqu'à ce qu'il soit en âge d'aller à la maternelle ). C'est une personne simple, optimiste et qui profite de ce que la vie lui apporte au quotidien.